“Eux” et “nous” : où est passée l’égalité?
Le non respect des restrictions Covid par l’élite politique accentue encore la colère contre un monde à deux vitesses. “ Is there now one rule for the rich and one for the rest of us?” Allison Pearson, The Telegraph
Double standard
En s’affranchissant des règles du COVID lors de leurs déplacements ou missions, les chefs de gouvernement et responsables politiques ont déclenché la fureur de leur population soumise à des restrictions strictes depuis le début de la pandémie.
La plus récente infraction, qui vient de déclencher un scandale au Royaume-Uni, est celle commise par Matt Hancock, ministre de la Santé britannique, enlaçant une de ses collaboratrices et s’attirant immédiatement les foudres de la presse et celle des réseaux. Ses excuses « pour avoir enfreint les règles de distanciation » ont été acceptées par le Premier Ministre Boris Johnson, mais pas par les britanniques qui exigent son départ. Le problème, comme l’analyse le journaliste, Fraser Nelson dans The Telegraph, c’est que les ministres Hancock et Sharp ont légiféré sur les aspects les plus intimes de la vie privée des citoyens britanniques. Sous l’état d’urgence, les vies privées ont été « criminalisées » . Les anglais n‘oublient ni les123 000 morts du début de la pandémie, ni les séparations cruelles et prolongées pendant un an et demi maintenant, qui privent les familles et les couples amoureux de se rencontrer.
Un scandale d’autant plus douloureux que rien ne justifie d’infliger ces séparations, contre lesquels des milliers de témoignages protestent, attestant parfois de suicides, de santé mentale dégradée. Qui eut cru il y a 3 ans que ce monde « global » et mobile en arriverait à traiter comme des prisonniers dans leur propre pays des citoyens n’ayant commis aucun autre crime que de tomber amoureux d’un partenaire d’une nationalité différente? Qui eut cru que la surdité et l’indifférence à l’enfer que vivent les couples séparés, seraient les seules réponses des chefs d’état, qui eux voyagent en toute liberté avec leur épouse? L’incident Matt Hancock ne fait que renforcer le sentiment qu’il y a décidément un « double standard » COVID, l’un s’appliquant au « commun des mortels », l’autre à élite VIP.
Pas de quarantaine pour la finale de l’Euro en Angleterre?
Autre motif de colère, l’exception de quarantaine pour la finale de l’Euro 21. Les règles que doivent suivre les voyageurs arrivant au Royaume Uni sont parmi les plus exigeantes et onéreuses du monde, Un test PCR négatif 72 heures avant le départ, et au minimum sur place 3 tests PCR prix moyen 120 à 160 livres, et une quarantaine de 10 jours. Etrangement il n’est pas tenu compte du vaccin. Pourtant considéré comme « notre meilleure défense”, par Jenny Harries, directrice générale de l’Agence de sécurité sanitaire britannique. Pour l’instant, la finale est prévue à Londres, et la jauge au stade Wembley est largement dépassée, avec l’autorisation de 60 000 fans. Mais plus discutable encore, il ne serait pas exigé de quarantaine pour les détenteurs d’un ticket.
Une démonstration de l’injustice qui commence à indigner la Grande-Bretagne des règles très dures pour la population — qui risque une amende de10 000 livres en les enfreignant — mais des exemptions dès qu’il s’agit d’enjeux économiques ou politiques, et aussi de popularité des leaders — et le sport est tout ça à la fois. Emmanuel Macron l’a bien compris quand il a donné l’ordre de repoussé l’heure du couvre-feu, fixé à 23 heures, lors de lors de la demi-finale opposant Novak Djokovic à Rafael Nadal, à Roland-Garros,. Autre occasion de ne pas suivre les règles. « “merci Manu ! » s’écrie la foule.
Rupture d’égalité
Selon que vous serez puissant ou misérable- Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. « Les Animaux malades de la peste » La Fontaine
Il y a donc maintenant « les gens importants », et les « gens qui ne sont rien », une expression malheureuse d’Emmanuel Macron à ses débuts. Exemption pour les uns, et peur et pénalité pour les autres. Les images du G7, avec barbecue sur la plage de Cornouaille et élégance des tenues des épouses, et d’autres déplacements en Europe, auront encore accentué cette conviction de « deux poids, deux mesures ». Une élite libre, mobile, sans problème financier, amie des riches, séparée par le double standard des règles COVID d’une classe moyenne ou pauvre, condamnée vivre sous la peur à suivre des règles qui ont ravagé leur vie privée, leur santé mentale, ruiné leur entreprise. Certes il y des « aides de l’état », des »aides de l’Europe », mais pour combien de temps? Les nouveaux variants semblent prolonger indéfiniment la pandémie.
Le sentiment d’une rupture d’égalité s’est ressent dans le taux d’abstention aux élections en France le 20 juin. « A quoi bon », « ça ne changera rien », le sentiment que la démocratie représentative ne les représente plus était l’argument majeur.Une mise à l’écart des « misérables » a provoqué la colère des Gilets Jaunes dont on semble mieux comprendre aujourd’hui la démarche. De nombreux mouvements sont très organisés, et de façon internationale, comme Exctinction Rebellion, c’est une tendance forte qui pourtant est totalement absente des choix électoraux.
Il y a un nouveau cynisme du pouvoir qui semble s’accorder sans état d’âme les pleins pouvoirs. Avec des tournées de serrage de main pour marquer leur « proximité » avec le peuple. Comme l’écrit l’éditorialiste Allison Pearson dans The Telegraph « ceux qui nous gouvernent sont dans l’ivresse du pouvoir absolu, et c’est celui rendu des hommes comme Hancock imprudents ».